Il y a eu une époque
Où je rêvais d’être ce genre d’écrivain
Célèbre et arrivé
Qui aurait lu, assimilé et
compris
Tous les autres grands écrivains
Russes, américains, français
et autres
Un génie bien habillé
Capable de citer d’une voix
claire
Et assurée en public
Des dizaines de belles
phrases
Empruntées à d’autres, des
phases
Comme autant de sentences
Propres sur elles
Et terriblement efficaces,
lancés
En l’air avec un certaine désinvolture
ou judicieusement placées
Dans d’intelligentes conversations
Sur un plateau de télévision
à des heures
où toute la planète dort
ou dans des journaux lus par des
intellectuels et des
politiques
Mais le peu de ces écrivains
qui avaient réussi
le truc - tromper leur monde
- et par là
je veux dire le peu que j’ai
lu,
étaient chiants comme la mort d’un mec
triste et usé, ils
parlaient trop joliment d’une
vie et de sentiments
Qui n’étaient pas les miens
Je n’ai plus ou moins admiré
que leur facilité vulgaire
à trouver et
conter avec lyrisme
un romantisme chimérique
dans le destin
de personnages brisés
par des choses aussi peu
romantique
que les guerres, la pauvreté,
la perte d’un amour fou et
aussi leur capacité
à n’employer aucun mot
« sale » pour arriver
à leurs fins. Il y avait
d’ailleurs tellement (trop)
de jolis mots qu’on aurait
dit que certains arrivaient
à se sucer la bite tous seuls
pour la garder lisse et
brillante
Sous les projecteurs et
J’ai fini par n’aimer que
ceux qui jettent
sur la feuille la
nauséabondes odeur
de la merde et du sang de
leurs tripes
ouvertes aux vents par le
canif rouillé et émoussé
d’une maudite existence
Sur le papier, ceux-là ne trichent
Pas et je rêvais de
réussite, prendre de
L’altitude, planer au dessus
du commun
des mortels, avoir les mots
justes et toucher
au cœur en une phrase tel un
violoniste
virtuose. Avec toute la
prétention
qu’offre la bêtise et
l’illusion propre
à mon caractère
je rêvais d’être important
Et de la liberté qu’offrent
le succès
Et le fric qui va de pair,
et
aussi des jolies groupies,
celles qui
envoient des photos de leurs
corps dénudés
pour séduire, s’offrent
à l’artiste dans des alcôves
sombres
ouais, j’aurais vendu
mon âme pour tout ça, mais
je l’ai perdue
avant qu’on m’en offre un
bon prix
et maintenant, à poil et
sans armes dans
la tempête, de la boue dans
les poumons
et du sang dans le vert de
mes yeux
je
crois bien que je
me fous de l’importance, de toute cette merde
la réussite, le pognon,
l’intelligence ou non de mon propos
et l’arrogance qui l’accompagne etc. ouais m’sieur
rien à battre, de tout ça,
de ne pas être
littéraire et de la
ponctuation et du
bon usage des majuscules
l’alcoolique hurle et la foule le lynche
peut-être que seul l’amour compte
dans cette vie merdique et
puéril d’enfant cassé
mais l’amour semble n’être
qu’un rare mensonge
quand
les
histoires de culs ne blessent pas le pèlerin
les femmes sont si dangereuses
la plupart du temps, les
miennes sont
splendides et abimées par
d’autres, elles aiment griffer
et qu’on leur fasse certaines choses
qui défient l’académique
vision de la poésie sentimentale
tout en étant susceptibles
de me poignarder sur un coup
de tête
si je leur tourne le dos, si
je leur offre mon flanc
et putain, je les aime avec toute la folie
que me procure cette douleur
que j’ai
à la place du cœur
et je crois bien que leur
beauté
et quelques mots griffonnés
sur le papier sans aucun
enjeu sinon
une certaine "salvation" mentale
ont fini par
me suffire
et peut-être qu’il existe
des moments
où ÇA
me sauve de moi
de mes ombres
et de toutes les fois ou mon
destin
est de sentir la bite d’un Dieu dingue
planté bien profond dans l’errance de
mon trou du
cul
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