J’étais assis sur un banc public lorsque
Dieu est venu s’asseoir à côté de moi. IL a posé son cul divin contre moi et je
me suis poussé tout en ressentant un amour indicible.
-
C’est
chiant qu’ IL a dit. Dès que j’approche un mortel il ressent ça et il sait
automatiquement qui je suis. Impossible de bénéficier de l’effet de surprise,
même pour faire une farce à un pote.
J’ai compris que Dieu pouvait lire dans
mes pensées ou tout au moins ressentir ce que ce qui se passait en moi. La
sensation de divin amour s’est estompée et je décidai de me méfier, j’avais
toujours eu un côté paranoïaque.
IL l’a compris et IL a secoué la tête
d’un air dégouté avant de sortir un paquet de cigarettes au menthol.
-
T’en
veux une ? qu’IL a fait en me regardant.
J’ai accepté en hochant la tête, chose
doublement surprenante puisque j’avais arrêté de téter la mort en pastille et quand
je fumais, je détestais les clopes à la menthe. Mais j’imagine que c’est dur de
refuser un truc à Dieu.
IL me l’a allumée avec un vieux zippo argenté.
Je me demandais ce qu’on foutait là tous
les deux, sous la pluie de Novembre.
-
Je
suis crevé qu’IL a fait.
J’ai pensé que moi aussi, mais je crois
bien que comme d’habitude, Dieu se foutait bien de ce qu’on pouvait ressentir.
En tout cas, IL n’a pas relevé. J’ai attendu la suite en L’observant. Ses
fringues étaient crasseuses et Sa barbe blanche mal taillée. Son œil était
morne et aucune lumière n’émanait plus de mon compagnon de
banc depuis la disparition de la sensation fugace qui m'avait révélé son essence. Limite on aurait pu le prendre pour un clochard, au mieux pour un
retraité pas bien lavé avec des problèmes récurrents d’incontinence.
-
Putain,
y fait un temps à aller aux putes qu’IL a déclaré, Dieu.
-
Ouais
j’ai dit.
Ça faisait longtemps que je n’avais pas
tiré un coup. Ma vie sexuelle était un peu comme le Sahara, en moins humide.
-
Tu
connais un bordel en ville ?
-
Il y a bien l’Enfer dans les petites rues pas
loin d’ici.
-
L’Enfer ?
-
Un
bar à hôtesses. Le champagne est cher et mauvais et suivant ses moyens on peut
se faire sucer dans la cour de derrière ou passer un peu plus de temps dans une
chambre à l’étage.
-
Ça
me plait. On y va ?
-
Tu
sais que j’ai dit à Dieu en le tutoyant parce qu’IL avait commencé, j’ai pas trop
d’oseille pour le moment, tu m’as pas trop favorisé jusque là, question
réussite sociale.
-
Oui
mais tu as une grosse bite, non ?
-
Non,
tu confonds.
-
Ah
merde. Et le proverbe aide-toi le ciel t’aidera ?
Un point pour Lui.
-
J’ai
eu beau me branler à l’adolescence, j’ai pas reçu une grosse bite.
Un point partout.
-
Bah,
après la cigarette, je dois pouvoir t’offrir une petite pipe afin de me
pardonner pour t’avoir si peu membré. Pour ma part, je pense me faire la
totale, champagne, chambre et deux ou trois poulettes bien roulées. Mais ce
serait bien le diable si je ne faisais pas croquer mon nouveau pote.
-
Sympa,
merci Vieu...Dieu !
-
C’est
le moins que je puisse faire si tu m’indiques le chemin, on y va ?
Bon, même s’il y trouvait un intérêt en
terme de lieu et d’itinéraire, il semblait bien que pour une fois Dieu se
souciait de sa brebis égarée. J’étais tellement aux anges à l’idée de tirer un
coup gratis que je ne me demandais même pas comment Son omniscience ne
connaissait pas l’adresse du moindre bordel et autres lieux de péchés sur terre.
En tout cas moi, je savais où un sale type comme moi possédait une chance de se
faire sucer contre quelques billets, là résidait la différence entre l’humain
et le divin.
On a commencé à marcher en silence. Dieu
ne semblait intéressé par ni les gens qu’on croisait, ni par l’idée de
converser avec moi.
On a fini par se retrouver devant
l’entrée de l’Enfer et je me demandais si on allait nous laisser passer, vu que
tous les deux, on ne présentait pas vraiment comme Donald Trump quand il se
rend à « pompe mon noeud land » dans son gros 4X4 noir aux vitres
fumées. Ceci dit, l’Enfer était un bordel glauque, pas le quatre étoiles de la
maison close. Le videur à l’entrée nous a regardé et Dieu a sorti une liasse de
billet de 20 épaisse comme la fourberie d’un politicien qui, allié à la
sensation divine qu’on éprouvait en rencontrant Dieu, a produit l’effet
escompté. Le cerbère nous a laissé passer en souriant. Dieu lui a filé un
bifton ou deux pour le remercier.
-
Tu
vois qu’IL a dit, Dieu, comme s’IL avait deviné mes pensées, c’est pas si
compliqué de visiter l’enfer.
-
Je
l’avais entendu dire au catéchisme !
Plus tard, Dieu était allongé sur le lit
avec trois prostituées roumaines presque majeures tandis que dans un coin je
besognais en levrette sur le plancher une petite russe aux yeux verts surement
pas plus âgée que les autres. IL fumait un cigare tout en buvant du champagne
pendant que deux filles se la donnaient dans une parodie de langoureux show
lesbien et que la troisième lui prodiguait une paradisiaque fellation histoire
de réveiller ses divines ardeurs. D’où j’étais, je voyais bien qu’IL bandait
mou.
J’ai joui péniblement dans la chatte de
ma pute à moi, puis j’ai ôté la capote et je me suis appuyé, nu, contre le mur
histoire de reprendre mon souffle. J’ai fais signe à la fille qui s’est levée
pour nous servir deux coupes de champagne. Ensuite, elle a ramené des
cigarettes et un cendrier. On a fumé
sans rien dire tandis que sa collègue semblait échouer à raviver la flamme
divine.
Dieu me semblait vide, usé, impuissant.
-
Je suis
fatigué qu’IL a fait, fatigué !
J’ai eu envie de lui demander pourquoi.
Pas pourquoi IL se sentait rempli de
fatigue, mais pourquoi les guerres, les meurtres, les viols, la solitude, la
souffrance, les maladies, la mort, la folie, la rage, la haine, les mécaniciens
malhonnêtes et les gynécologues hommes, pourquoi ce trou dans le regard de la
pute de dix sept ans que je venais de baiser et
ce qu’elle foutait là, il existait bien la possibilité d’un meilleur
destin pour elle, non ? Pourquoi j’étais fou, immonde, vivant,
alcoolique ? Pourquoi pour toute la merde de la vie, pourquoi pour toutes
les fois où j’avais regardé la réalité et où je m’étais dit que Dieu devrait
arrêter de jouer au poker avec le Diable parce qu’IL perdait ?
-
PARCE
QUE ! qu’Elle a rugit, Sa voix, dans ma tête.
Bon j’imagine qu’après avoir baisé dans
la même pièce, je pouvais partager mes pensées avec Lui tout en n’obtenant
aucune réponse précise à toutes ces questions merdiques qui me taraudaient
l’esprit tout d’un coup. Sans doute qu’à sa place, si ma création partait en
couilles comme le monde actuel le faisait en ce moment, je tenterais aussi de
me planquer derrière un mystérieux parce-que qui signifiait « les voies du
seigneur sont impénétrables, tu peux pas comprendre » en plus concis. Tout
d’un coup, Dieu m’apparaissait tel un ministre véreux pris en défaut par un
journaliste lors d’un talk show en direct.
Pendant que je m’interrogeais sur le sens
de son Divin parce que, Sa virilité a fini par se redresser et la pute s’est
mise à califourchon sur lui. Il penchait la tête sur le côté pour profiter du
spectacle des deux autres filles qui venaient de démarrer un plus ou moins
torride 69 tandis qu’elle s’activait sur son membre avec de frénétiques va et
vient avec l’intention évidente d’en finir le plus vite possible.
Trois minutes plus tard Dieu a joui.
Pas de cris, pas de tsunami ni d’autres
catastrophes naturelles pour accompagner sa jouissance. IL a juste gémi
doucement.
Puis IL s’est endormi tandis que la pute
allait laver sa chatte remplie de Divin Foutre.
(Oui, Dieu baise sans capote. On peut
imaginer que Son éternité préserve des maladies vénériennes et pour la
déontologie, IL avait payé le double pour ne pas en utiliser pendant l’acte).
IL a roupillé un bon moment, les putes avaient
toutes disparues une fois le champagne bu jusqu’à la dernière goutte, mais Ses
Ronflements on fini par cesser. J’attendais toujours et j’avais fumé presque
toutes les cigarettes lorsqu’IL a ouvert les yeux. Il était tard et nous sommes
partis manger au restaurant. Il a pris un poisson avec du riz car nous étions
vendredi avec un pichet de rouge et moi, une entrecôte frites saignante parce
que je pratique peu la religion.
-
Des
belles salopes ces trois putes, c’est rien de le dire. Elle t’a plu ? la
tienne, celle que tu as baisée ?
-
Elle
simulait, comme elles le font toutes.
-
Normal,
à leur place, toi aussi tu saignerais de l’anus et des yeux tout en faisant
semblant d’aimer pour que ça aille plus vite, c’est le métier qui veut ça.
Ciel, Dieu était cynique !
J’ai songé à notre visite à l’Enfer.
Là-bas comme ici, lorsqu’IL approchait les gens, pendant quelques secondes, une
extase béate se peignait sur leurs visages. Puis tout disparaissait et Dieu
nous dévoilait soudain une présence triste et solitaire.
Je me demandais si les filles qu’on avait
payé pour abuser d’elles se souviendraient de leur première rencontre avec leur
Créateur.
-
T’inquiètes,
je ne les oublierais pas quand viendra l’heure de me rencontrer à nouveau.
-
Ok
que j’ai dit sans remettre en cause Sa Divine Parole.
Bordel de merde, j’avais trouvé Dieu, d’accord,
mais où tout cela nous menait-il donc ? Qu’est-ce que je foutais là à
bouffer avec Lui ? Et pourquoi semblait-IL si… vieux ? On aurait dit
que l’immortalité lui pesait encore plus que le travail à un fonctionnaire.
L’avions nous déçu à ce point, nous, le genre humain ? On aurait dit que
oui.
-
Toi
aussi, IL a ajouté, t’auras droit à une place à ma droite… Au bar !
IL a éclaté de rire sous l’effet de sa
propre plaisanterie (promesse ?), puis IL a avalé une bouchée avant de se
pencher en arrière sur son siège. Dans cette position, IL a lâché un rot
bruyant, comme ça, en plein milieu du restaurant. Autour de nous, les
conversations se sont tues. IL s’est rapproché de moi en se penchant au dessus
de l’assiette comme s’IL avait voulu toucher mon visage. Ses yeux brillaient
sans que je puisse dire s’ils étaient larmoyants ou juste pleins d’alcool.
-
tu
sais qu’IL a dit. Ça fait un moment que ça dure, t’as même pas idée. Mais je
suis fatigué, fatigué… Tellement de temps que je me sens...
Je ne savais quoi lui dire pour lui
remonter le moral, tenter de remettre une étincelle dans le bleu lavasse de Son
regard éternellement usé. Peut-être que nous L’avions déçu, peut-être qu’IL
nous avait déçu et qu’IL en souffrait, en vérité je n’en savais rien. J’ai
failli lui suggérer une cure de sommeil.
-
Fatigué !
qu’IL a encore ajouté.
Puis IL a pris sa tête entre ses mains et
il n’a plus parlé. On aurait dit qu’IL s’était endormi. Je m’attendais à ce
qu’IL se remette à ronfler là, comme ça, en plein milieu du restaurant.
Moi, depuis le début, j’attendais quelque
chose, une parole, un signe… Et planté en face de lui et d’une entrecôte
accompagnée de frites maison, j’attendais encore, mais rien ne se passait, rien
ne venait. J’avais envie de pisser mais je n’osais pas bouger.
Putain, il n’y avait aucun sens à toute cette merde.
Putain, il n’y avait aucun sens à toute cette merde.
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire