vendredi 24 mars 2017

Putain de looser (Autopsie d’un ratage)

J’avais toujours cru
En l’idée de devenir un écrivain célèbre
Parce qu’un écrivain n’est pas obligé
De fréquenter ses collègues de boulot
            Et qu’il est clair
            Qu’il baise plus facilement
            Qu’un ouvrier de chez Michelin
            Je sais de quoi je parle
            J’ai été un ouvrier de chez Michelin
Et j’ai connu mieux pour se faire savourer
La queue
            Par la jolie bouche peinte d’une
            Fille incroyablement belle dans la vingtaine
Et je me voyais bien
            Rester enfermé chez moi pendant des jours
            à écrire, mater des films américains
            Noircir des pages et des pages de phrases
            Etranges et percutantes qui parleraient
            à des générations entières d’âmes avides
            De folie et d’autodestruction, tout ça
En me branlant jusqu’à saigner, sans me laver
sans me raser
En écoutant des chansons mélancoliques et
Peut-être de l’opéra si le besoin s’en faisait sentir
En buvant de la vodka, en hurlant après l’éventualité
d’une divinité
En maudissant mon amour, en suppliant qu’une
Pute aux talons hauts viennent me sauver de moi
avec sa jolie chatte bien chaude
Parce que les putes et la baise sauvage sont un moindre
Mensonge quand on les compare à celles
que l’on couvre d’un amour fou en espérant
Les protéger du froid avec le vain espoir
De les retenir près de son âme effilochée
et ouais, c’est comme
Ça que je voyais le cliché, ce qui devait être
ma manière à moi
De m’ouvrir le bide avec le brillant katana du poète
            ivre d’autosatisfaction et d’auto apitoiement
Pour en vider les tripes et la merde fumantes sur quantités
de blanches pages
vierges mais pas farouches
J’avais toujours cru en la possibilité
de finir comme un putain d’écrivain
            avec ma paire de couilles poétiquement scarifiée
inscrite en filigrane sur les petites culottes humides
De jolies étudiantes en littératures diversement appliquées
Et la cervelle étalée sur le mur de la création
Pour parfaire le suicide littéraire résultant de l’analyse
Froide et lucide de la folie résiduelle
d’une vie passée à se détruire sans autre mauvaise raison que
tuer les voix qui hurlent dans ma tête
Et me poussent à me jeter le visage en avant contre les murs
De ma prison mentale
Tout ça parce que je ne voyais pas quoi faire à la place
Sinon gangster ou politicien mais
                        Les hommes politiques sont tous des
                        Des fils de putes qui sucent
            les banquiers qui sucent satan le
            grand capital et quoi qu’on en
dise, avec un peu d’intelligence
et un bon sens de la corruption
            les dealers de drogues durent
            même en prison
            mais je n’aimais pas l’idée
            du sang sur les mains et encore
            moins le risque de finir enfermé
            j’avais déjà construit ces geôles intérieures
            qui n’appartiennent qu’à moi et
            elles me suffisaient
                        Ecrivain, ça me paraissait cool
Vu que je n’étais pas plus fait que toi pour la vie normale
(personne n’est fait pour la vie normale, il y a juste, à
différents degrés,
ceux qui arrivent à la supporter), c’était ça l’idée
                        être le cri déchirant qui empêcherait ta propre nuit de t’étouffer
et pour tout ça, plutôt deux fois qu’une
                                                            j’étais prêt à payer le prix
m’asseoir au premier rang et lever le doigt bien haut pour donner
                        la réponse, plonger en apnée dans un océan de mazout
avaler jusqu’à la garde
la bite bien raide de dieu, lui lécher les couilles avec application
le laisser jouir dans ma bouche et, bien sur, tout avaler jusqu’à la dernière
                                                goutte
                                                avec l’avidité d’une bonne petite chienne
                                                bien dressée
            tout était bon tant que cela ne nuirait pas à la pure intégrité
                        de mon âme de gratte papier
et ceci n’explique ni mes larmes ni ma rage, mais peut-être
            mon obstination à écrire la nuit quand je devrais
chercher à baiser, ou à dormir, ou à me branler sur du porno
de mauvaise qualité
et d’accord, j’ai tout raté et ça aussi mais
quitte à tout rater,  et bien que je me foute de Sinatra et de sa voix de crooner
j’ai préféré le faire à ma manière
                                                écrire m’a toujours laissé croire
                                                que je ne vivais pas à crédit
et si je n’ai rien d’un putain d’écrivain
être un putain de looser, c’est toujours être un putain de quelque chose
on se rassure comme on peut diras tu, mais ce serait négliger
l’importance de ce vivace sentiment, le dévorant besoin d’exister
                        peu importe la subtilité du pas de danse
                        c’est l’intensité du mouvement
                        qui rend immortelle
chacune des explosions
de ton cœur déréglé

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire