mardi 22 juin 2021

Le miroir de blanche neige

la lesbienne têtue avait 19 ans quand on est devenue vraiment pote, comme frère et sœur,
et moi 34
mais notre amitié a duré de nombreuses années 
et je ne sais pas vraiment expliquer pourquoi c'est terminé aujourd'hui
Sans doute que j'ai fini par ne plus être assez bien, il semblerait que ce soit un 
de mes traits dominants
 
ça peut paraitre bizarre, moi l'hétéro stupide à l'humour gras et la  gamine bouffeuse de touffe
 
mais faut dire ce qui est,
elle était plus mûre que moi l'éternel sale gosse et
surtout
je l'avais aidée deux ans plus tôt et elle voulait me rendre la pareille
 
j'étais suicidaire, complètement en morceaux et désemparé
incapable de lutter contre ce qui me rongeait et d'oublier cette fille qui avait envahi mes veines
mon cœur, ma tête et mon âme de damné
 
c'est comme ça que tout a démarré
 
et c'est elle qui m'a sauvé la vie.

les choses n'étaient pas simple pour elle
elle ne savait pas trop comment gérer son homosexualité au grand jour
et elle ne se trouvait pas belle
dans sa famille, on disait que la beauté était  sa sœur et elle, l'intelligente
autant dire que cette vision réductrice n'était pas là meilleure aide psychologique
qui soit pour aucune des deux, bien que leur mère sache et leur dise la vérité, les deux étaient
belles
ET
très intelligentes

Le premier soir qu'elle est venue me voir,
la lesbienne têtue m'a confié qu'elle
n'avait jamais foutu les pieds dans un endroit purement gay m'a-t-elle dit
alors qu'on buvait un verre quelque part.
 
Aussi sec je l'ai embarquée direction le bar homo d'un pote

on a bu un canon ou deux et ça lui a plu, on est revenu souvent.
 
Elle doutait vraiment de son physique, alors rapidement, cette fois là ou la suivante,
je lui ai fait bombé la poitrine
malgré ses petits seins et je l'ai envoyée pisser en utilisant ce que j'appelle la marche de la princesse,
c'est à dire en tordant du cul comme une pute pour allumer le dancefloor tout en gardant
un port altier 
(tête haute et regard rempli de flammes) 

Ce ne fut pas trop évident tant elle était timide, elle était plus du style à marcher 
en rasant les murs
ce qui n'était pas elle
 
(elle laissait le monde extérieur modeler sa personnalité et je savais
les effets dévastateurs que cela peut faire, j'avais moi aussi rasé les murs
 dans ce cas là, je préconise de faire ce que l'on veut
et d'envoyer chier ceux que ça dérange, les autres sont une chaine dont on doit s'affranchir 
au plus vite sous
peine, non pas de mourir esclave, mais pire, de vivre esclave)

j'ai du la menacer pour la convaincre de m’obéir
je ne me souviens plus de quoi, exactement, sans doute de la
laisser rentrer à pieds ou d'appeler mon ex pour lui déclamer mon amour ou de botter son cul
de lesbienne en
public, quoi qu'il en soit, elle l'a fait
 
et quand elle eut traversé le bar dans un sens pour pisser et dans l'autre pour revenir
ses yeux brillaient,
"mais, ça marche, elles m'ont toutes matée"
 
bien sur que ça marchait
elle était une bombe et ne le savait pas
 
Ce soir là je n'ai rien fait de spécial pour elle
 
je me suis contenté d'être le miroir de blanche-neige, 
en mieux 
puisque
je n'ai pas fait que lui dire ô combien elle était belle, je lui ai prouvé
et aussi qu'elle était libre, que le monde pouvait lui appartenir

j'avais connu une certaine forme d'exclusion quand j'étais gosse,
né pauvre dans une ville plutôt aisée et pas assez beau pour qu'on oublie ça
deux fois coupable
c'était facile de l'aider, j'ai juste dit ce que j'aurais aimé qu'on me dise
 
je n'écris pas ce truc pour me faire passer pour un type bien, je n'en suis pas un
je choisis avec qui être un peu moins pire
 
c'est tout. 
 
Concernant l'homosexualité, 
adolescent n'ayant décelé en moi aucune attirance pour les membres du même sexe
je m'étais interrogé sur ce que devait être mon attitude envers ceux qui étaient différents de moi
(j'avais de bonne bases sur comment appréhender la différence
catégorisé moche, on s'était bien payé ma gueule sur mes oreilles décollées et mes fringues d'occasion)

rapidement, j'en avais conclu simplement ce qui suit :
 
                            ça ne change strictement rien à ma vie que
                            deux mecs s'enculent à cet instant
                            pas plus que si deux filles se mangent le minou
 
je ne voyais donc aucune raison de les détester
 
fin de la réflexion

 et ça aussi ne fait pas de moi un type bien, juste un peu moins pire que certains

 
 


 

 
 

 

 


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