samedi 26 mai 2018

Loin de l’équateur, dernière nuit contre la peau de la fille avec la bouche en forme de cœur

J’ai foutu une photo de toi en fond d’écran
Sur mon ordinateur
Allongée sur le ventre en noir et blanc
Il y a ta jolie petite gueule
Ta jolie bouche en forme de cœur
Et ton joli p’tit cul de sportive
Une jambe repliée en l’air avec un talon noir pris dans l’élastique de ton string
Tu ne portes que ça, un string, des chaussures noires, ton insolente beauté et ton
Regard de femme fatale
Autant dire que j’aime beaucoup cette photo.
On avait fait la fête et on avait bu, surtout moi et tu avais dis en rentrant
Qu’on allait se la jouer modèle et photographe
Et après tu n’avais pas voulu coucher avec moi
Ce qui était une cruelle torture après ton effeuillage en règle
Devant l’objectif derrière lequel se planquaient mes yeux remplis
De la bave du vieux pervers, si près de ton corps et pas le droit
De toucher
Pas de doute, tu savais jouer avec moi, tu connaissais par cœur le
Mot de code, celui qui m’arrête même avec trois grammes
Mais après tout, sans doute devais-je le mériter
Tu devais avoir 23 ans et moi beaucoup plus et c’est cette fois là
Que tu m’as dit
« je veux un mec comme toi, mais de mon âge »
et c’est peut-être ce qui m’a sauvé de toi
cette sentence que je connaissais déjà
qui m’interdisait de laisser vivre tout ce qui voulait vivre en dedans
et j’aurais bien aimé gouter une dernière fois ton miel
tes lèvres
ta peau
le son délicat de tes gémissements
mais ce sont des choses qui arrivent
j’avais eu ma chance, ces soirs où tu étais venue
juste pour moi
avec tes sourires comme des guirlandes lumineuses
et tes yeux rieurs et moqueurs, sure de ta force et
de ton pouvoir sur moi et
je n’ai jamais su comment tu faisais pour me regarder
et voir quelque chose en moi, quelque chose qui me faisait
me sentir beau
plus beau que tous ces types aux dents bien alignées
et je n’ai nulle nostalgie ni chagrin en regardant cette photo
tu étais un morceau de lumière dans ma nuit
de la chaleur contre le froid de ma mort intérieure
et je n’ai nul regret si ce n’est d’avoir été profondément
alcoolique à cette époque, et tu m’as sauvé
de moi-même sans t’en rendre compte et voilà, je souris en matant
ton joli cul sur mon écran, je souris en repensant
à ta magie,
il y avait tellement de vide en moi et toi
tu te pointais et tu foutais la dedans un truc chaud
                                                            qui battait fort et
c’était me souvenir que je pouvais être vivant

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